Don du corps à la science : que faut-il savoir ?

Don du corps à la science : que faut-il savoir ?

Le don du corps à la science est un acte particulièrement fort qui peut lourdement peser sur sa famille et ses proches. S’il fait l’objet d’une démarche personnelle, volontaire et encadrée par des règles précises, il mérite d’être soigneusement abordé avec son entourage et de se renseigner sur les procédures appropriées pour faire un don en toute sécurité.

Don du corps à la science : de quoi s’agit-il ?

Le don du corps à la science est défini par le Code de la santé publique comme la décision, pour une personne majeure, de donner son corps après décès à des fins de recherche et d’enseignement médical. Il s’agit d’un acte volontaire, librement consenti et exprimé par écrit. Chaque année, 2500 à 3000 personnes font ce choix en France.

Le don du corps à la science ne doit cependant pas être confondu avec le don d’organes, dont l’objet est le prélèvement d’organes, de tissus ou de cellules à des fins de greffe sur un patient. Tandis que le don d’organes est un acte de soins, le don de corps participe au progrès scientifique à travers l’enseignement médical et la recherche fondamentale. Il représente l’unique voie légale permettant d’étudier le corps humain.

Les corps humains confiés à l’enseignement médical et à la recherche sont conservés pour une durée de 2 ans maximum avant d’être restitués à la famille. Ils sont employés pour l’enseignement de l’anatomie en faculté de médecine, à la recherche sur des affections ou des maladies, le développement de nouvelles technologies médicales ou de procédures chirurgicale, etc. Afin d’optimiser le don, les corps sont susceptibles d’être partagés en fragments anatomiques, distribués à plusieurs programmes ou établissements.

Quelles sont les procédures pour un don du corps ?

Le don du corps à des fins d’enseignement médical et de recherche est strictement encadré par le Code de la santé publique. Il se fonde sur la notion de consentement et doit émaner d’un acte volontaire. La décision ne peut être prise que par les personnes majeures, à l’exception des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique (tutelle, curatelle…).

Il s’agit d’une démarche strictement personnelle, mais qui engage à la fois le donneur après son décès et l’établissement bénéficiaire. Etant donné la nature de cet acte et le fait qu’il implique la soustraction du corps à son entourage, nous vous encourageons à en discuter et à informer votre famille et vos proches de votre décision.

Contacter une structure d’accueil de don du corps

Le don du corps ne peut se faire qu’auprès d’un établissement de santé, de formation ou de recherche certifié par le ministère dont il dépend. La personne majeure doit, un premier temps, faire une demande d’information auprès de la structure la plus proche de son domicile.

Liste disponible sur le site du ministère de l’enseignement supérieur.

La procédure suit alors les étapes suivantes :

  • Remise du document d’information : le donneur potentiel est informé qu’il peut soit demander que son corps ou ses cendres soient restitués à sa famille au terme de l’activité de recherche, soit s’opposer à cette restitution.
  • Consentement par écrit : le donneur doit exprimer son consentement par une déclaration écrite, signée et datée ; l’établissement doit co-signer ce document et s’engage ainsi à respecter la volonté du donneur quant à la restitution de son corps ou de ses cendres.
  • Délivrance d’une carte de donneur : la délivrance de cette carte marque l’engagement de l’établissement à accepter le don ; le donneur devra la porter en permanence sur lui.
  • Désignation d’une personne référente : le donneur peut désigner un référent en tant qu’interlocuteur avec l’établissement bénéficiaire.

Le donneur peut se rétracter à tout moment et doit le cas échéant avertir l’établissement par écrit.

Transport et accueil du corps par l’établissement autorisé

Après le décès du donneur, l’établissement doit assurer à ses propres frais le transport du corps jusqu’à sa structure d’accueil. Aucune somme d’argent ne peut donc être exigée du donneur ni de sa famille. Toutefois, au moment de la restitution du corps à la personne référente, à la famille ou à des proches, des frais peuvent leur être appliqués.

Bien qu’il se soit engagé à transporter et accueillir le corps, l’établissement peut dans certains cas refuser le don :

  • Décès suite à un accident, un suicide ou toute cause entraînant un problème médico-légal ;
  • Décès suite à une maladie contagieuse ou toute cause entraînant un risque sanitaire ;
  • Décès à l’étranger nécessitant une mise en bière (placement du corps dans un cercueil) ;
  • Mauvaise conservation du corps ou non-respect du délai de 48 heures pour le transporter ;
  • Absence de la carte de donneur.

Restitution du corps ou des cendres après la recherche et l’enseignement

Au terme des activités de recherche et d’enseignement médical, l’établissement doit prendre en compte la volonté exprimée par le donneur lors de son consentement.

Selon le décret n°2022-719, si le donneur a clairement exprimé la volonté de restitution de son corps ou de ses cendres, l’établissement s’engage à respecter cette décision et informe la personne référente désignée, ou à défaut la famille, de la possibilité de restitution.

En l’absence de volonté explicite du donneur ou en cas de contraintes liées aux types d’activités réalisées sur le corps, la restitution peut ne pas être possible. Dans ces situations, l’établissement procédera aux opérations funéraires appropriées, soit par crémation soit par inhumation, tout en tenant compte des souhaits exprimés par la famille ou les proches lorsque cela est possible. Les établissements doivent également fournir aux familles des informations claires et précises sur le moment et la nature des opérations funéraires prévues.

Impact psychologique et éthique autour du don du corps

Bien qu’il émane d’une décision strictement personnelle, le don du corps à la science peut avoir un impact psychologique notable sur l’entourage du donneur. La prise en charge du corps par l’établissement prive brutalement la famille et ses proches de la contemplation du défunt et peut entraver le processus de deuil.

Afin de limiter cet impact, il est donc crucial pour le donneur d’en discuter avec les membres de son entourage et de les inclure dans sa décision. Ses motivations peuvent notamment aider ces derniers à accepter le don de son corps : altruisme, volonté d’être utile, conscience sociale, désir de faire progresser la recherche ou de peser dans la lutte contre la maladie…

Chaque année, les établissements de santé, de formation ou de recherche bénéficiaires organisent une cérémonie d’hommage en mémoire des donneurs, à laquelle peuvent participer les proches. Cet hommage peut aider ces derniers à poursuivre leur processus de deuil, notamment lorsque le corps n’a pu être restitué à la famille.

La question de l’éthique et du respect du corps peut également se poser, notamment depuis la révélation en 2019 du scandale du charnier de l’université Paris-Descartes. Si cette interrogation engendre une crainte tout à fait légitime de la part du donneur et de son entourage, la révélation du scandale a permis de réformer et de renforcer le cadre juridique du don du corps à la science. Les établissements sont depuis tenus par la loi de s’engager « à apporter respect et dignité aux corps qui leur sont confiés » et à être assisté par un comité d’éthique, scientifique et pédagogique.